Gestion du bois dans le cadre d’une production sidérurgique intensive. Le district de Fiko (pays dogon, Mali) - Université Toulouse - Jean Jaurès Accéder directement au contenu
Chapitre D'ouvrage Année : 2016

Gestion du bois dans le cadre d’une production sidérurgique intensive. Le district de Fiko (pays dogon, Mali)

Résumé

Dans la littérature scientifique, la sidérurgie traditionnelle est souvent présentée comme une des principales causes de la déforestation, de la dégradation du couvert végétal ou même de la désertification de certaines régions d’Afrique de l’Ouest (Haaland 1980, 1985 ; Goucher 1981, 1986 ; de Barros 1986 ; Herbert et Goucher 1987 ; Hahn 1997 ; Thompson et Young 1999 ; Pelzer et al. 2004). Ce lien univoque supposé – métallurgie → déforestation – s’appuie sur l’estimation de la consommation du bois utilisé comme combustible dans les activités sidérurgiques. Il ne prend pas en compte le fait que le bois est une ressource renouvelable et que son utilisation peut perdurer aussi longtemps que son exploitation n’excède pas sa capacité de reproduction (Von Maltitz et Scholes 1995). Grâce à l’anthracologie, l’histoire des paysages peut être reconstituée de manière satisfaisante et les changements de végétation intervenus au cours du temps détectés. Cette discipline n’a été pour l’instant que peu utilisée dans les contextes paléo-sidérurgiques ouest-africains. Lorsqu’elle a été mise à contribution, les examens ont consisté à déterminer les charbons prélevés à l’intérieur ou à proximité de bas fourneaux isolés. Les essences boisées utilisées comme combustible ont été ainsi identifiées mais aucune reconstitution des comportements (sélection des espèces, changement des espèces utilisées, stratégie de gestion du bois, etc.) n’a été entreprise. La mauvaise conservation des échantillons ainsi que le nombre insuffisant des fragments identifiables rendent souvent délicats les interprétations (Rolando 1992 ; Neumann et Vogelsang 1996 ; (Dupuy et Rolando 1999 ; Dupuy et al. 2001-2002 ; Kiethéga 2009, 269 ff.). Dans le cadre du programme interdisciplinaire et international « Peuplement humain et paléoenvironnement en Afrique de l’Ouest », dirigé par Eric Huysecom, un volet était consacré à l’évolution de la métallurgie du fer en pays dogon (Mali), de ses origines jusqu’à nos jours (Serneels et al. 2006 ; Robion-Brunner 2010). Il a permis de mettre en lumière un patrimoine sidérurgique exceptionnel et de différencier sept traditions à partir d’une classification fondée sur des critères technologiques, culturels et économiques. Afin d’analyser la gestion des ressources boisées dans le cadre de la métallurgie du fer et ses conséquences écologiques, nous avons sélectionné la tradition regroupant des ateliers dont la production était intensive et excédentaire, dont l’implantation géographique est assez bien définie et circonscrite, dont l’activité s’est déroulée sur une longue période et dont les charbons de bois sont bien conservés. Il s’agit de la tradition Fiko. Située dans la partie occidentale du plateau de Bandiagara, elle se compose de 16 sites de réduction (Huysecom et al. 2009 ; Robion-Brunner 2010). Notre étude s’est focalisée sur les sites de Fiko, Kéma, Kéma-Koundiouli et Gumbessugo. Elle a combiné l’analyse anthracologique des charbons de bois prélevés en contexte stratigraphique lors des sondages effectués dans les amas de scories avec une série de datations radiocarbones correspondantes. L’histoire récente de ces ateliers (18ème-20ème siècle) a été appréhendée à partir des informations obtenues lors des enquêtes ethnohistoriques. Afin d’établir une corrélation possible entre des changements de végétation et les activités sidérurgiques des sites de tradition Fiko, nous avons mis en place une démarche interdisciplinaire (Eichhorn et al. soumis a, b). Elle se fonde sur : -l’établissement des ratios de matières premières (pour obtenir une tonne de scories, il faut tant de minerai et tant de charbon de bois, ce qui équivaut à tant de bois frais) pour estimer la quantité de bois nécessaire à la formation des amas de scories des sites de tradition Fiko ; -la comparaison des calculs de consommation à ceux de productivité annuelle des formations mixtes ligneuses/graminéennes (Clément 1982) afin de vérifier si l’exploitation des essences boisées était en-dessous ou au-dessus des seuils écologiques.
Fichier non déposé

Dates et versions

hal-02011249 , version 1 (07-02-2019)

Identifiants

Citer

Caroline Robion-Brunner, Barbara Eichhorn. Gestion du bois dans le cadre d’une production sidérurgique intensive. Le district de Fiko (pays dogon, Mali). Marina Lafay; Françoise Le Guennec-Coppens; Élisée Coulibaly. Quels regards scientifiques sur l’Afrique depuis les indépendances ?, Karthala, pp.313-332, 2016, 978-2811-1-1559-3. ⟨10.3917/kart.lafay.2016.01.0313⟩. ⟨hal-02011249⟩
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