La personnalité au centre de la pensée bergsonienne
Abstract
L'apport du livre est de montrer que la pensée bergsonienne peut être comprise comme implicitement ordonnée à la personnalité saisie comme foyer à partir duquel le réel en général et l'expérience humaine en particulier peuvent être éclairés. Il y a un lien direct entre substantialité et personnalité, dans la mesure où l'unité même de l'être vivant créateur tient à cette continuité de changement tenue dans les limites d'une mémoire agissante qui ne cesse de se créer elle-même par l'effort réalisé à travers l'organisme qu'est notre corps vivant. La personnalité serait un point focal pour une philosophie qui critique radicalement la notion d'être fixe et immuable et la renvoie aux nécessités de l'action (le besoin de fixer le réel mouvant pour les nécessités de l'action conduit à la position par l'intelligence de l'être comme support immuable de tous les changements). Or, la grande intuition de Bergson est la durée qui nous fait appréhender le réel comme mouvement continuel ; mais si le réel, et chacun de nous au cœur du réel, n'est pas une pure diversité fluente, si la substantialité n'est pas exclue de la réalité, c'est par la personnalité. Et depuis les analyses sur le moi développées dans l'Essai sur les données immédiates de la conscience (1889) jusqu'aux ultimes développements sur la personnalité créatrice des mystiques à travers laquelle se poursuit l'effort créateur, il y a une continuité dont la notion de personnalité rend compte. La personnalité comprise comme substantielle continuité de changement se substitue à l'être et fait sortir de la métaphysique fondée par Platon sans renonciation à penser le réel tel qu'il est en lui-même.